Le Chabot Association Agréée de Protection
de la Rivière Ariège
Unité Touristique Nouvelle pour la création d’un refuge de montagne sur le plateau de Beille
1 – Intérêt à déposer de l’association « Le Chabot » de Protection de la Rivière Ariège :
Notre Association de Protection de la Rivière Ariège « Le Chabot » agréée protection de l’environnement s’est donnée pour objectif de « retrouver et conserver la richesse biologique et le milieu naturel de la rivière Ariège et de lutter contre tout ce qui porte ou peut porter atteinte à la qualité de son écosystème ».
Conformément aux statuts de l’association, le terme « rivière Ariège » s’applique au système fluvial de la rivière Ariège, c’est-à-dire au réseau hydrographique de la rivière dénommée et son bassin versant. Outre le cours d’eau principal, son lit et ses berges, sont inclus notamment tous les affluents, les territoires intéressés par les crues, qu’ils les reçoivent ou soient susceptibles de les recevoir, les eaux souterraines en connexion directe ou diffuse avec l’Ariège ou ses affluents, les milieux humides en relation directe ou indirecte avec le cours d’eau ou ses affluents, et d’une manière générale l’ensemble des territoires impliqués dans les apports et les échanges , quels qu’ils soient, avec le système fluvial Ariège.
Le plateau de Beille et ses milieux humides associés, par son appartenance au réseau fluvial de l’Ariège, est dans les préoccupations immédiates de notre association.
La demande de création d’un refuge de montagne, impactant ou susceptible d’impacter les milieux humides environnants, intéresse donc directement l’association.
2 – Le contexte de création d’un nouveau refuge sur le plateau de Beille :
2-1 Le plateau de Beille a déjà fait l’objet d’une première UTN qui a abouti à la création d’un centre de ski de fond ayant nécessité des aménagements importants. Création de voies d’accès goudronnées et pérennes, parkings conséquents, bâtiment d’accueil, captages d’AEP, système d’assainissement, création de circuits de randonnée et de pistes de ski de fond etc. Un hébergement sur site était prévu mais n’a pas été réalisé.
Ces aménagements se sont fait sur dans un milieu naturel d’une grande richesse biologique mais fragile. Cela n’a pas été sans conséquence sur les milieux, les habitats naturels et les espèces présentes sur le plateau. Lors de la demande de cette nouvelle UTN, on aurait pu s’attendre à ce qu’un bilan des conséquences de ces aménagements soit établi pour pouvoir juger des effets de ce premier niveau d’anthropisation. Ce n’est pas le cas et cela pénalise fortement la crédibilité des mesures compensatoires prévues dans le nouveau projet.
2-2 Le secteur concerné fait l’objet de plusieurs mesures, niveaux et types de protection : pas moins de deux types de Znieff concernant 7 zones recensées, un Natura 2000, un arrêté de protection de biotope et une Zico. Ces zonages sont justifiés par le recensement d’un nombre très important d’espèces et d’habitats emblématiques à haute valeur patrimoniale. Ces espèces ressortent des Protections nationales, Conventions internationales et Livres d’inventaires d’espèces menacées.
Ainsi, en ce qui nous concerne, plusieurs zones humides, zones de tourbières et cours d’eau classés en très bon état écologique sont impactés ou susceptibles de l’être par ce projet.
A ce titre, le projet doit être analysé au regard des sources réglementaires :
- de niveau Européen, « La préservation et la gestion durable des zones humides s’inscrivent dans le cadre des politiques européennes de gestion durable des ressources naturelles et de préservation de la biodiversité (directive-cadre 2000/60/CE sur l’eau, réseau « Natura 2000 » issu des directives 92/43/CEE « habitats » et 79/409 /CEE « oiseaux », notamment). »
- de niveau National et Régional : Loi sur l’eau et les milieux aquatiques, Grenelle de l’environnement et SDAGE Adour Garonne.
Les unes et les autres ne sont que très partiellement prises en compte dans le dossier.
Ainsi par exemple, le pétitionnaire fait ressortir à plusieurs reprises que « les ZNIEFF et les ZICO sont des outils de connaissance et non des instruments de protection réglementaire …». C’est passer sous silence que « la loi de 1976 sur la protection de la nature …interdit aux aménagements projetés de détruire altérer ou dégrader le milieu particulier à des espèces protégées » et ignorer que la jurisprudence constante admet les « ZNIEFF comme expertise pour apprécier la présence d’espèces protégées ou de milieux particuliers ».
2-3 Le nouveau « refuge », bâtiment de près de 800m2, d’une capacité d’accueil de 50 personnes et 60 couverts à 1 heure 30 de marche (a peine) à plat du Parking de la station, doit s’analyser avant tout comme un projet d’hôtellerie de montagne. Situé entre l’accueil de la station (1h30) et le refuge de montagne du Rulhe (3h30), et bien qu’il soit sur la route du GR10, le « refuge de Beille présentera peu d’intérêt pour les randonneurs au long cours ou de haute montagne. En ce sens, ce dossier doit être considéré comme une extension de la station existante, sédentarisant une population importante de skieurs et promeneurs sur une zone sensible de protection, à enjeux prioritaires, jusque là « relativement » épargnée.
3 – Les impacts prévisibles du projet
La dénomination du lieu d’implantation du refuge « Prat Moll » ne laisse aucun doute sur la qualité des milieux concernés et il est illusoire de penser qu’une implantation dans un corridor, de moins de 100 mètres de large, « non mouillé » n’aura pas d’impact significatif sur l’ensemble de la zone des mouillères et lieux humides associés.
3-1 sur les zones humides et les espèces présentes :
Trop souvent, le rôle multifonctionnelun réservoir de biodiversité ou diversité biologique. Ainsi, en France, 30% des espèces végétales remarquables et menacées vivent dans les zones humides et environ 50% des espèces d'oiseaux dépendent de ces zones.
Ces zones assument dans leur globalité les différentes fonctions essentielles à la vie des organismes qui y sont inféodés:
- fonction d'alimentation : découlant de la richesse et de la concentration en éléments nutritifs observées dans ces zones, elles assurent ainsi une mise à disposition de ressources alimentaires pour de nombreuses espèces animales localement et à distance par exportation de matière organique ;
- fonction de reproduction : la présence de ressources alimentaires variées et la diversité des habitats constituent des éléments essentiels conditionnant la reproduction des organismes vivants ;
- fonction d'abri, de refuge et de repos notamment pour les amphibiens et les oiseaux. Ces fonctions biologiques confèrent aux zones humides une extraordinaire capacité à produire de la matière vivante; elles se caractérisent ainsi par une productivité biologique nettement plus élevée que les autres milieux.
- fonction d'alimentation : découlant de la richesse et de la concentration en éléments nutritifs observées dans ces zones, elles assurent ainsi une mise à disposition de ressources alimentaires pour de nombreuses espèces animales localement et à distance par exportation de matière organique ;
- fonction de reproduction : la présence de ressources alimentaires variées et la diversité des habitats constituent des éléments essentiels conditionnant la reproduction des organismes vivants ;
- fonction d'abri, de refuge et de repos notamment pour les amphibiens et les oiseaux. Ces fonctions biologiques confèrent aux zones humides une extraordinaire capacité à produire de la matière vivante; elles se caractérisent ainsi par une productivité biologique nettement plus élevée que les autres milieux.
La proximité immédiate des zones B32 et B31 (moins de 100m), malgré les propositions compensatoires de mise en place de pontons et/ou de barrières interdisant l’accès, induit des nuisances directes. Effarouchement, piétinement et pollutions diverses (sonores, organiques, visuelles), accompagnent trop souvent la mise à disposition de lieux très fragiles à une trop grande fréquentation. La présence humaine permanente sur le site constitue en soit une source de dérangement rédhibitoire pour certaines espèces.
Il est à noter que la période d’hiver correspond à un des taux de remplissage attendu les plus fort du refuge, c’est aussi la période la plus difficile à passer pour les espèces présentes sur le secteur ou le moindre dérangement peut mettre en danger la survie des individus.
3-2 sur les écoulements et la qualité des eaux :
La ressource en eau sur le secteur concerné est très fragile. Les études menées font ressortir cette faiblesse et abordent timidement les impacts ou les éludent purement et simplement, renvoyant à des études ultérieurs (lorsque le projet sera passé !).
C’est le cas pour les rejets d’eaux polluées ou aucune étude d’assainissement n’est menée. Pourtant, le pendage naturel de la zone fait de la zone humide de tourbière B31 l’exutoire obligé des eaux usées du refuge, sans aucun échappatoire possible, sinon celui de remonter les effluents par pompage pour les sortir du secteur des tourbières. Or cette problématique de pompage, faisant appel à un besoin important d’énergie, a fait l’objet d’une décision négative concernant l’implantation du refuge lui-même (cft page 149 choix du site alternatif). Les effluents chargés sont une menace directe et connue pour les espèces protégées recensées. Ils contribueront aussi à altérer la qualité des eaux du ruisseau de Balanza, en connexion avec le bassin du Lavail (masse d’eau A311) classé en « très bon état écologique » au sens de la DCE et du SDAGE.
Concernant la ressource en eau potable, la faiblesse de débit du captage pose, outre la fiabilité de l’approvisionnement en eau du refuge, la question de l’assèchement des zones humides associées. S’agissant d’un milieu montagnard d’altitude, le fonctionnement optimum du refuge, prévu en période de plein été et plein d’hiver, correspond exactement aux deux périodes de stress hydrique maximum de ces milieux particuliers, d’étiage d’été et de gel hivernal. L’impact du prélèvement pour consommation humaine conduira à l’allongement de ces périodes de stress pouvant entraîner la disparition du milieu et/ou ses espèces inféodées.
3 – 3 sur les mesures compensatoires :
L’efficacité des mesures compensatoires et rectificatives envisagées, clôture girondine et pontons, reste à démontrer face à la concentration de personnes sur un espace restreint. L’expérience de la station existante montre l’étalement et l’occupation de tout l’espace du plateau autour des aménagements, les groupes cherchant à s’éloigner ou s’isoler les un des autres.
D’autre part, rien ne peut être envisagé pour compenser ou éviter les nuisances sonores inhérentes à une forte fréquentation, sur une faune particulièrement sensible, discrète et farouche.
Quand à la prise d’un arrêté de protection de biotope (APPB) sur une zone de 200 hectares, s’il est un élément à conserver du projet, c’est bien celui là. C’est en effet une mesure qui devrait dater de la première UTN afin d’enrayer le déclin inexorable constaté et pourtant prévisible des espèces emblématiques du secteur de Beille. Cette mesure compensatoire rétroactive devrait inclure le secteur concerné par le projet afin d’en assurer définitivement sa protection.
En Conclusion :
Ce projet de création d’un refuge sur le plateau de Beille, au lieu dit Prat Moll, défini comme exemplaire sur le plan environnemental par le pétitionnaire, présente au contraire les caractéristiques de ce qu’il convient d’éviter de projeter et de réaliser sur des zones fragiles, d’intérêt remarquable, abritant des populations patrimoniales, faunistiques et floristiques, bénéficiant des plus hautes protections réglementaires.
Une large partie de ce territoire fait l’objet d’aménagements importants, sacrifiant déjà un espace naturel à haute valeur environnementale au développement économique local ; un nouveau projet à l’autre extrémité du plateau cumulerait les effets négatifs et annulerait tout espoir de préserver les espèces encore présentes.
Si un besoin d’hébergement se révèle être indispensable pour pérenniser l’activité de la station de Beille, il parait beaucoup plus judicieux et valorisant pour l’image de la station, de penser le projet sur le secteur déjà équipé et sacrifié.
Pour les raisons évoquées précédemment, l’association « Le Chabot » de protection de la rivière Ariège, porte à la connaissance de la commission départementale spécialisée du comité de massif ses observations négatives sur ce projet qui ne devrait pas voir le jour.
Varilhes le 8 janvier 2011
Pour le Président de AAPRA « Le Chabot »
Henri Delrieu
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